Je sortais de la bibliothèque. Oui oui, je sais, qu'est-ce que je faisais dans une bibliothèque alors que je pouvais avoir tout les livres que je voulais en allant sur internet... Eh bien ce n'était pas un livre que je cherchais justement, mais les archives de Forks et des bourgades environnantes. J'avais besoin de savoir un maximum de chose au sujet de la villa dans laquelle j'habitais, et surtout pourquoi Diable la famille de mon père avait investi dans un pareil trou paumé... Non franchement, certaines choses me dépassaient. En fait j'avais peur que... non, c'était stupide. Il fallait que je me calme et que j'arrête d'être paranoïaque. Je soufflais rapidement par le nez. Ces fichues archives m'avaient mis plein de poussières dedans, et j'avais du me séparer de mon odorat pendant tout le temps que j'étais là-bas.

Je sortis rapidement de l'imposant bâtiment et respirai librement l'air extérieur. Ça faisait du bien de sentir les odeurs. Bien que cela soit inutile, je remontai le col de mon long manteau pour donner le change, après tout que diraient les humains s'ils voyaient que leur médecin ne se couvrait pas alors qu'il faisait froid dehors ? D'un pas mesuré, je traversai le parc, laissant mes yeux vagabonder sur la végétation. C'était en fin de journée, les étudiants devaient à peine sortir de leur cours... Je passai une main dans mes cheveux quand au loin, j'aperçus une silhouette que je reconnus... Elena ! La première personne que j'avais croisé ici ! Avec un sourire, je lui fis signe et voyant qu'elle était seule, je la rejoignis pour la saluer.

Dos à moi, elle ne me vit pas arriver et elle fut on ne peut plus surprise quand je déposai avec douceur ma main sur son épaule. Je sentis sous ma main ses muscles se contracter brusquement et simultanément, la faisant sursauter. J'y étais habituée depuis que je travaillais à l'hôpital, mais je m'amusai toujours de la lenteur des réactions humaines. Avec mes sens et ma conscience décuplés, leur vie me paraissait lente quand elle était trop rapide pour eux. Et pourtant, c'était moi qui avait l'éternité devant moi... Ces humains étaient des créatures fascinantes. Son visage se décomposa en des expressions distinctes. La première bien évidemment allait avec sa réaction : surprise. Ensuite, elle eut un instant un éclat d'espoir dans ses yeux sombres, avant qu'il ne soit étouffé dans l'œuf. Pourtant, elle me sourit, et semblait plutôt contente de me voir.

Brusquement, un détail me frappa. Son odeur... je la reconnaissais. C'était celle de l'humaine qui traînait dans les environs lors de la bataille. Focalisée sur Démétri quand je n'étais pas sous la coupe de la blonde, je n'y avais pas fait attention mais à présent, c'était si clair que je m'en demandais comment j'avais fait pour ne pas la reconnaitre plus tôt. Je ne me pensais pas si négligente... il allait falloir que je me charge de rectifier ce petit défaut. Mais disons que pour cette fois, j'avais l'excuse de l'imprégnation. Cependant, sa présence à cet événement amenait de nouvelles questions. D'abord, que faisait-elle là-bas, ce n'était pas un lieu pour un humain. Ensuite, que savait-elle sur ce qui c'était passée... ? Et enfin, plus important, jusqu'à quel point était-elle au courant pour l'existence du monde souterrain des vampires et des loups-garous ? Un sourire apparut à mon tour sur mes lèvres et je laissais retomber ma main le long de mon corps.

Ah ! Vous avez vu comment j'ai trop progressé dans les relations humaines ? Et ouais, l'hôpital, ça vous change la vie. A présent, j'en savais beaucoup plus sur les habitudes humaines et leur fonctionnement, et j'étais capable de passer inaperçue dans n'importe quelle foule sans avoir l'air étrange ou décalé. Je me fondais petit à petit dans la masse.

Apparemment, j'avais encore des progrès à faire en terme de relation humaine. La pauvre fille semblait totalement gênée face à moi... Qu'est-ce que j'avais dit encore ? Je ne comprendrais jamais les humains, c'était définitif. Peut être fallait-il avoir passé un jour dans cet état pour les comprendre et dans ce cas là, mon cas était perdu d'avance, j'étais née hybride et je n'avais pas la moindre goutte de sang ou de fraction d'ADN humain. Les loups avaient été humains, les vampires avaient été humains, les hybrides étaient à moitié humain sauf moi. J'étais la bête parfaitement noire dans ce monde de gris plus ou moins foncé et de blanc. Même si les vampires n'avaient parfois pas le moindre souvenir de leur vie d'avant, il devait y avoir forcément quelque chose qui me manquait. L'air définitivement gênée, elle me répondit d'une petite voix :

Ah oui. Normal quoi. Euh... Attendez... Elle n'avait pas dit vampire dans sa phrase là ? Les deux frères vampires ? Petit ami ? Chasser ? Ok. Respirons, calmons-nous. Analysons sagement les informations qu'elle venait de me donner. Il y avait deux frères. D'accord. Et elle les connaissait. D'accord. Les deux étaient vampires. ... D'accord. Et elle sortait avec l'un d'eux. ... ... D'accord. Le vampire en question était parti chasser. D'accord. Et l'autre, disparu de la surface de la Terre. D'accord. Je ne savais pas exactement ce qui me choquait le plus. Qu'elle connaissait l'existence des vampires ? Qu'elle sortait avec l'un d'eux ? Ou qu'elle n'est pas fini en plateau-repas sur le champ ? ... Peut être un peu tout ça. En même temps, ça expliquait sa présence sur le champ de bataille, et aussi pourquoi elle était toujours en vie malgré le grabuge. Non mais ces humains, ils n'avaient donc aucun instinct de survie ? Bon, en même temps, maintenant plus rien ne m'étonnait venant d'eux. Le seul problème allait être que si les Volturi venait à apprendre qu'une autre humaine était au courant de leur secret... Monde de barge, ville de barge. Mais qu'est-ce que je faisais ici... En tout cas, elle avait l'air soulagé d'avoir parlé. Autant être sincère tout de suite.

Elle n'avait pas l'air inquiète le moins du monde. En fait, elle me regarda avec un petit air surpris, comme si elle était étonnée que je lui dise ça et que je m'inquiète pour elle. Eh ! Je n'étais pas médecin pour rien après tout. Je n'étais pas la personne la plus altruiste du monde, et j'avoue que j'étais quelqu'un d'assez solitaire, n'empêche que j'essayais de sauver des vies tout les jours. Alors prévenir quelqu'un qu'elle risquait sa vie en trainant trop longtemps avec des vampires, si végétariens furent-ils, c'était un peu normal non ? Enfin, elle semblait au courant, puisqu'elle me sourit d'un air rassurant. Ses mains chaudes s'enroulèrent autour de mon bras et elle m'attira un peu à elle pour que je m'assoie près d'elle. Je n'aurai eu aucun mal à résister bien sûr, ce n'était qu'une humaine, mais je me laissais faire et prit place sans un bruit près d'elle. Cependant, au lieu de m'asseoir correctement, je me tournai pour lui faire face, l'un de mes bras posé sur le dossier alors que je coinçais mon pied sous l'un de mes genoux pour tenir la position. Cela n'avait rien de particulier comme position, ce n'était pas très convenable dans les manières, mais ce n'était pas déplacé non plus. Et puis, j'étais mieux quand j'étais face aux gens.

Ohoh, c'était quoi ce 'en vie' ? Il y avait quelque chose de louche là-dessous, surtout à en juger son petit air qu'ont les humaines quand ils ne disent qu'une demi-vérité. Ça cachait quelque chose... Enfin, en même temps à bien y réfléchir, c'était tout à fait normal. Son petit-ami devait avoir son age physique, peut être un peu plus à la limite, et elle risquait de se faire tuer si les Volturi étaient au courant qu'elle savait pour le monde souterrain. Donc, le choix le plus logique serait de la transformer en vampire... Oui, c'était compréhensible après tout. Et puis, c'était sa vie elle en faisait ce qu'elle voulait. Bref, je décidai de laisser tomber le sujet. Si tout allait bien, alors tant mieux, de toute façon ce n'était pas mes histoires... Et j'avais autre chose à faire.

Et voilà, ça recommençait. Maintenant, même les humains s'y mettaient ! Je devais être maudite, j'avais du noyer un chaton dans une vie antérieure pour que le sort s'acharne ainsi sur moi. Il allait falloir que je me fasse une raison, dès que j'allais rencontrer quelqu'un de nouveau, j'allais devoir lui expliquer le pourquoi du comment de ma race. D'habitude, il n'y avait que les vampires et les loups-garous qui étaient capable de remarquer cette différence à cause de mon odeur - il allait vraiment falloir que je pense à m'acheter du déodorant - mais maintenant, même les humains qui savaient un tout petit peu de chose allaient s'y mettre. Enfin, de toute façon elle allait être totalement plonger dans le monde vampirique d'ici peu alors je pouvais bien lui dire maintenant.

Mais moi aussi j'étais curieuse, et je me demandais comment elle était au courant pour les vampires et tout le reste. Et puis, comment elle avait fait pour qu'un vampire s'entiche d'elle ? Ce n'était pas des créatures réputées pour leur grande sympathie envers les humains après tout.

-Bien sûr, pour maintenant... Je suis une hybride, un mélange entre un vampire et un loup-garou. Ma mère était humaine, mon père loup-garou. Peu de temps avant l'accouchement, elle s'est faite mordre par un vampire et une partie du venin m'a affectée... Mon ADN a su muter suffisamment pour faire cohabiter les deux races et me voilà.

Elle me sourit. Moi, je trouvais ça plutôt étrange mais plus rien ne m'étonnait. Je n'étais pas blasée. Plutôt ... Habituée. Enfin bon ... Je lui rendis son sourire. Je l'aimais bien cette Dawn malgré ses petites différences.

Elle eut soudain cette lumière dans l'oeil. Celle de la curiosité. La même que celle qui brillait dans mes yeux à moi quelques minutes plus tôt. Qu'avait-elle donc à me demander pour être aussi intriguée ?

-Mais comment es-tu au courant pour les vampires ? Et comment as-tu fait la connaissance de ton... petit ami ?

J'aurais du m'en douter ! Ca aurait été trop facile si je n'avais eu à répondre à aucune questions. En même temps, ce n'était pas trop difficile à expliquer ... Je remontais dans le temps. Enfin dans ma mémoire. Je me souvenais parfaitement du jour où je l'avais réalisé. J'étais allé le chercher chez lui et j'étais monté dans sa chambre où je l'avais vu sur le toit, buvant le sang d'un pauvre pigeon. J'avais reculé, j'étais tombé et il m'avait rattrapé de justesse. Très romantique ... --'

-J'étais allé le voir chez lui car je sentais qu'il me cachait quelque chose et je l'ai trouvé sur le toit, s'abreuvant d'un pigeon, oui je sais c'est pas très sexy ^^. Enfin bon, j'ai reculé, suis tombé et il m'a rattrapé. Mon héros quoi.

Je riais à ma phrase. Ca me faisait du bien de pouvoir en parler avec quelqu'un, sachant que c'était un secret.

Elena me sourit en retour. Bon, elle n'avait pas l'air quand même très... comment dire... je ne connaissais pas le terme exact. En tout cas, ce n'était pas un réel sourire, il était plutôt... résigné. En même temps j'étais bête, elle venait de savoir l'existence des vampires et voilà qu'elle apprenait qu'il existait aussi des hybrides et que ça allait encore mettre le bazar tout ça. J'oubliais parfois combien les humains n'avaient pas l'habitude du monde souterrain, de notre monde, de mon monde. Il allait falloir que je m'y fasse et que je fasse attention à ce que je disais avec elle... Je ne voulais pas non plus qu'elle s'enfuit en courant. A ma question, son regard se perdit dans le vague, certainement cherchait-elle dans ses souvenirs. J'ignorai si la mémoire humaine était réellement bonne ou non puisque je ne l'avais jamais été. Sans bouger d'un pouce, j'attendis calmement qu'elle me réponde.

Un... pigeon ? Il fallait vraiment avoir soif. Ou alors ça lui servait de canette, mais j'avoue que je n'avais jamais eu l'idée saugrenue d'aller boire du sang de pigeon. D'abord parce qu'il en faudrait beaucoup pour me rassasier, ensuite parce qu'il fallait les attraper ces stupides volatiles, après parce que mordre dans des plumes ça devait pas être très évident et enfin parce que ça devait avoir un goût horrible. Des pigeons... Non mais franchement. Les gens sont fous, je vous le dis moi. Et donc, le gentil monsieur avait rattrapé la madame alors qu'elle manquait de tomber. C'était mignon et... assez cliché en fait. Un vrai prince charmant. Elle rit d'une manière plus détendue à la fin de sa phrase et je compris qu'elle ne devait pas pouvoir en parler à grand monde. Qui connaissait les vampires après tout ? Je ris légèrement avec elle. C'était vrai que la situation était plutôt comique... Et puis, ce ne devait pas être le genre de souvenir qu'on racontait souvent.

Je la contempla alors qu’elle se perdait dans ses pensées, rassemblant visiblement ses souvenirs. Ah ! La mémoire humaine. Je n’allais pas en parler de nouveau, mais je m’amusais à chaque fois du temps qu’ils leur fallait pour rassembler leurs souvenirs... A croire que c’était un exercice difficile. Bon d’accord, j’admets que parfois, moi aussi il fallait que je me plonge dans mes pensées pendant un moment pour en sortir le souvenir voulu, mais disons que j’avais une excuse. J’avais presque un siècle, et je me souvenais de quasiment chaque chose de ma vie, alors il fallait que je retienne plus de chose que les humains... Et aussi, je me souvenais tout le temps de tout, même si ça remontait à dix ans et que je mettais cinq minutes à m’en souvenir. La mémoire humaine elle, était beaucoup plus aléatoire, et ils avaient beau chercher pendant une heure, parfois leur mémoire refusait de leur obéir et ils ne retrouvaient jamais tous les détails. C’était comme ça.

Il était bien évident que je connaissais les Cullen, l’une d’entre elles étant ma mère... Et donc, tout le reste de la famille m’était donc lié. Je ne vous raconte pas ma surprise quand j’ai appris que j’avais un beau-père, trois demi-frères et deux demi-sœurs... Du jour au lendemain en plus. Je peux vous assurer que ça choque. J’avais l’habitude de faire cavalier seule et d’un coup, paf ! J’avais tout un clan... Même si la plupart ignorait mon existence. C’était tant mieux. Quand au frère de Stefan... C’était qui Stefan . Son copain ou l’autre carnivore... ? Bon, soyons logiques. Si elle avait voulu désigner son petit-ami, elle ne l’aurait pas présenté comme étant le frère de l’autre... Donc Stefan était son petit ami, et il avait un frère dont j’ignorai le nom. A sa question, je hochai simplement la tête en signe d’affirmation, puis elle continua à parler.

Elle n’acheva pas sa phrase. Apparemment, elle n’était pas sûre d’elle... Tiens, d’ailleurs, les paroles de Démétri me revinrent en mémoire. Il avait parlé d’une humaine qui était avec Edward... Ce n’était pas Elena puisque les prénoms ne correspondaient pas. Et puis même, cela n’aurait pas été logique avec tout ce qu’elle avait dit... Donc je supposais qu’elle parlait bel et bien de la copine d’Edward. Démétri ne m’avait pas dit si elle était au courant de l’existence des vampires ou non, mais c’était peut être l’occasion d’en savoir plus sur cette histoire. Mais quel monde de dingue, je vous jure.

Elle me regarda visiblement surprise. Ahah ! Tu ne t'attendais pas à ce que je sois au courant n'est-ce pas ? Je pris son expression et sa réaction pour une affirmation. Dans un sens, ça m'arrangeait bien. Après tout, cela voulait dire qu'il n'y avait 'que' deux humains au courant de notre existence... D'un côté, j'étais soulagée que tout Forks ne la sache pas. Les humains étaient d'un naturel bavard et ces vicieuses petites bestioles comprenaient bien trop vite les choses qu'il ne fallait pas,a lors qu'ils mettaient trois ans à découvrir les choses les plus évidentes qui étaient sous leurs yeux. Mais d'un autre côté, ça restait deux personnes de trop. Si les Volturi l'apprenaient, il y avait de fortes chances pour qu'ils fassent une nouvelle descente ici. Elle sembla se perdre un instant dans ses pensées. Je la fixais du coin de l'œil. Enfin, elle au moins allait être transformé. Ça ferait toujours un humain de moins... Je priai seulement pour qu'elle soit devenue vampire avant que ça arrive aux oreilles des italiens...

Soudain, l'humaine sembla s'agiter. Elle redressa la tête pour regarder autour d'elle, cherchant visiblement quelque chose... Les humains étaient-ils donc tous aussi incapables de tenir en place ? Je suivis son regard quand je vis ses yeux s'écarquiller de stupeur. Elle fixait le clocher de l'église... Quoi, qu'est-ce qu'il se passait ? Elle était devenue allergique aux croix maintenant ? Je la vis bondir sur ses pieds, à une allure qui devait être rapide pour un être humain. Puis, elle se tourna vers moi et devant son air pressé et impatient, je compris ce qui l'avait mis dans cet état. L'heure. Il y avait une horloge au clocher de l'église... Je me contentai de hocher la tête à ses paroles, sachant pertinemment qu'elle n'entendrait pas la réponse. Au moins, ça me permettait d'économiser ma salive.

Je la regardai s'éloigner en courant, m'amusant une nouvelle fois de la lenteur des humains. C'était assez paradoxal d'ailleurs, c'était pour eux que le temps était compté, et pourtant c'était nous, les créatures immortelles qui voyaient le temps passer au ralenti. Comme si l'éternité n'était pas assez longue comme ça... Je soupirai et regardai autour de moi. Bien, je n'avais plus rien à faire ici. D'un geste fluide, je me levai et rentrai tranquillement chez moi, perdue dans mes pensées.